Chapitre VII

Principes philosophiques  des médecines traditionnelles


Médecine indienne: l'ayurvéda

Origines

L'ayurvéda, qui signifie littéralement "science de longue vie", est considéré comme une branche des védas, textes sacrés de l'Inde. Ceux-ci sont au nombre de quatre. Leur rédaction a été précédée d'une longue tradition orale. On estime que leur origine remonte vers 2000 à 2500 ans avant notre ère. Les textes classiques les plus anciens et  les plus importants de l'ayurvéda qui sont restés conservés, Charaka Samhita traitant de la médecine générale  et Sushruta Samhita concernant la chirurgie, datent d'une époque qui se situe entre le septième et le troisième siècle av. J.-C.. Comme ces textes se réfèrent eux-mêmes à des textes antérieurs, on peut estimer que l'apogée de cette médecine se situe avant le cinquième siècle av. J.-C., en tout cas avant la naissance du Bouddha (vers 550 ans av. J.-C.). L'ayurvéda, adopté par le bouddhisme, suivit son expansion vers le Tibet, la Chine, le Japon, l'Indochine et l'Indonésie. Par l'intermédiaire de l'empire perse, il atteignit également l'Europe. Le grec Hippocrate, au quatrième siècle av. J.-C., n'indiqua pas ses sources, Galien par contre, qui vivait à Rome au deuxième siècle, ne cacha pas l'origine indienne de ses connaissances. Au quinzième et au seizième siècle, l'Islam conquit l'Inde, la tradition indienne fut réprimée et la médecine Unani (déformation de "ionien" et d'origine hippocratique) de tradition musulmane, supplanta l'ayurvéda. Après l'Islam, l'arrivée des colonisateurs européens et de leur médecine contribua à sa dégénérescence. Actuellement l'Inde reprend conscience de la valeur de ses traditions, l'ayurvéda est de nouveau enseigné à côté de la médecine scientifique moderne et son importance a été reconnue par l'organisation mondiale de la santé (OMS).

La philosophie du Samkhya. (1)

L'ayurvéda est une application pratique de la philosophie du Samkhya. Cette médecine, pratiquée depuis trois millénaires au moins et qui a influencé toutes les autres médecines traditionnelles, a prouvé amplement son efficacité. Ses fondements philosophiques méritent donc une attention particulière et des explications plus détaillées.

Le Samkhya est une philosophie réaliste: il considère le monde matériel comme réel, contrairement aux autres philosophies indiennes importantes, le bouddhisme et l'hindouisme. Il explique l'univers par une théorie de la transformation fondée sur une analyse subtile de la relation de cause à effet. "Ce qui est appelé cause est l'état non manifesté de l'effet et ce qui est appelé effet est l'état manifesté de la cause ... car rien ne peut sortir du néant et rien ne peut s'évanouir dans le néant." Notre physique est aussi bâtie sur ce principe avec ses lois de conservation de l'énergie ou de la matière. Mais dans le Samkhya, la portée déterministe de l'identité de la cause et de l'effet est atténuée par la distinction entre la cause matérielle ou constitutive (Upâdâna) à laquelle elle s'applique, et une autre cause (Nimitta) qui réunit les causes efficiente, formelle et finale de la logique aristotélicienne et qui introduit un élément extérieur, probabiliste ou indéterministe. Cause et effet ne sont donc ni absolument identiques ni absolument dissemblables.

Conformément à ce principe de l'identité de la cause et de l'effet, le Samkhya affirme que le monde ne peut pas être sorti de quelque chose qui était absolument inexistant et qu'il est manifesté par une transformation à partir d'une cause non manifestée mais réelle. "Le Samkhya affirme que le monde est réel, qu'il existe, et qu'il provient de quelque chose qui est réel, qui existe," mais à l'état non manifesté, et qui contient virtuellement toutes les choses. Cela s'appelle Prakriti, la mère des choses matérielles.

Prakriti, principe matériel non manifesté, est défini comme un état d'équilibre parfait des trois Gunas: Sattva, Rajas et Tamas. Ces Gunas, qui ne sont manifestés qu'à l'état de déséquilibre, lorsque l'un d'eux domine les autres, sont décrits comme des substances extrêmement fines. Ils sont caractérisés par les propriétés suivantes:

Sattva Rajas Tamas
Illumination Evolution Involution
Manifestation Mutation Conservation
Connaissance Réflexion Mémorisation
Plaisir Douleur Indifférence

Le Samkhya explique le monde par une suite de transformations, de passages de cause matérielle à effet manifesté, qui progresse du plus général vers le plus particulier, du plus subtil vers le plus grossier, et non pas en sens inverse. Ceci correspond à la règle de la pensée systémique, non réductionniste, selon laquelle l'ensemble détermine toutes les qualités des parties composantes alors que la somme des propriétés des parties ne suffit pas pour expliquer les propriétés de l'ensemble. Cette suite de transformations apparaît dans le schéma de Nandalal Sinha, reproduit ici (Fig. 5 ) de manière légèrement modifiée et confronté avec les trois niveaux de la connaissance de Ken Wilber.

Fig. 5 - Evolution selon le Samkhya

Evolution selon le Samkhya


"A l'origine de la création, une vibration cosmique s'élève dans Prakriti, perturbant son état d'équilibre, elle libère les Gunas de leur quiétude. Rajas soudain agit sur Sattva qu'il manifeste en tant que Mahat". Mahat est l'équivalent matériel ou cosmique de Buddhi, la conscience. Elle est la conscience cosmique et on l'appelle Mahat pour la distinguer des consciences individuelles, les Buddhi, qui sont des aspects partiels de la conscience cosmique.

"De Mahat surgit Ahamkara: Cogito, je pense, entraîne sum, je suis. Ahamkara est littéralement celui qui fait le Moi", l'ego, principe d'identité personnelle et d'individuation,  il est la base de l'égoïsme.

"La transformation d'Ahamkara est double selon qu'elle est influencée par Sattva ou par Tamas. Les modifications sattviques sont les 11 Indriyas", à savoir les 5 Indriyas de la connaissance, les 5 Indriyas de l'action et de l'excrétion et Manas, la conscience.

"Les modifications tamasiques d'Ahamkara sont les 5 Tanmatras, à savoir le son, le toucher, la forme, la saveur et l'odeur. Ce sont des éléments purs, subtils et simples, la part métaphysique des atomes ordinaires de matière. Ce sont des substances fines." Ces transformations progressent dans le sens des flèches du schéma. Ahamkara produit le son, celui-ci, accompagné toujours d'Ahamkara, produit le toucher et ainsi de suite.

"Les transformations des Tanmatras sont les éléments grossiers éther, air, feu, eau, terre, - les atomes ordinaires de matière, dans lesquels apparaît pour la première fois la distinction entre le plaisir, la douleur et l'indifférence."

"Jusqu'à présent, tout ce monde objectif est sans intelligence, parce que sa cause, Prakriti, est sans conscience. Par conséquent il n'existe et ne fonctionne pas pour son propre compte. Il doit exister quelqu'un d'autre, de nature différente, quelque être conscient, pour le bénéfice duquel (par exemple pour l'expérience ou la paix) toute cette activité de Prakriti existe. C'est ainsi que le Samkhya explique Purusha. De ces deux, Purusha est le principe de l' Etre, Prakriti le principe du Devenir. Purusha existe éternellement, ne devient jamais, alors que Prakriti est essentiellement mouvement.... L'expérience de Purusha consiste à être le spectateur indifférent des changements qui ont lieu dans Buddhi."

Nandalal Sinha poursuit ses explications en abordant d'autres sujets importants du Samkhya, mais dont la portée téléologique et sotériologique n'intéresse pas directement la présente étude. Ce qui est important à relever, c'est que, selon le Samkhya, le monde manifesté est produit par l'interaction de deux principes non manifestés, donc transcendantaux, contraires mais complémentaires, dont l'un, Prakriti, principe matériel à l'état potentiel, tient le rôle de l'objet, et l'autre, principe conscient inactif et non manifesté, tient le rôle du sujet. Le monde manifesté ou créé résulte donc d'un acte de connaissance. D'autre part, cette genèse de la réalité évolue en trois étapes, formant trois niveaux dont chacun est représenté par une dualité sujet-objet. La dualité transcendantale (Purusha-Prakriti) produit l'ordre cosmique (Mahat) et trois significations fondamentales (les trois Gunas), qui correspondent au niveau de la connaissance herméneutique ou niveau du Mental de Wilber. Cette nouvelle dualité produit le psychisme et les organes de l'action et de la sensation  du sujet individuel (Indriyas), lesquels, confrontés aux qualités des éléments grossiers (Mahabhutas), sont à l'origine de toutes les représentations des  objets matériels du monde manifesté. Chaque niveau de la Réalité (Esprit, Mental et Matière) correspond donc à une dualité sujet-objet et par conséquent à un niveau de la connaissance, car la pensée indienne ne fait pas la distinction entre une réalité objective et une réalité subjective. Il n'existe qu'une réalité manifestée, celle qui émerge de l'interaction sujet-objet. Connaissance et réalité sont identifiés.

Les principes fondamentaux de la médecine indienne. (2)

Le Samkhya traite surtout de questions philosophiques, donc de problèmes concernant l'origine et la destinée de l'homme et du monde. Il s'occupe donc essentiellement de la relation que nous avons avec le niveau supérieur ou transcendantal de l'existence. L'ayurvéda au contraire s'intéresse seulement aux rapports qui existent entre les êtres vivants que nous sommes et l'environnement matériel dont nous sommes issus.

Pour l'ayurvéda, l'homme reflète l'organisation de l'univers décrit par le Samkhya. L'homme, comme microcosme, présente donc les mêmes niveaux de l'existence, ou plutôt de la transformation permanente, que l'univers. Au niveau inférieur, les éléments cosmiques marquent la limite entre la matière et le vivant. Au niveau supérieur on retrouve un principe ternaire analogue aux trois Gunas. Alors que les trois Gunas représentent l'origine unique de l'univers manifesté, les Tri Doshas, aussi appelés les trois "humeurs", sont le fondement de l'unité de l'être vivant individuel. Entre ces deux niveaux, celui des éléments et celui  des Doshas, s'organise la constitution anatomo-physiologique du corps humain.

  Les cinq éléments cosmiques (Mahabhutas).

Selon le Samkhya, tout ce qui existe est composé de cinq éléments présents simultanément mais dans des proportions variables. Le même principe s'applique donc  aussi au corps humain. Les éléments éther, air, feu, eau et terre correspondent, selon le Samkhya, aux cinq impressions sensorielles: le son, le toucher, la forme, la saveur et l'odeur. Mais pour l'ayurvéda ils signifient surtout cinq degrés de densité croissante de la matière: subtil, gazeux, clair, liquide et solide. L'ayurvéda a établi une liste de dix paires de qualités antagonistes telles que lourd-léger, froid-chaud, humide-sec, obtus-aigu etc., qui suffisent pour caractériser chaque élément et qui permettent de classer les substances médicamenteuses selon les éléments auxquels elles appartiennent et d'en déduire leurs propriétés thérapeutiques les plus générales.

Un élément cosmique n'est pas une substance qui peut être observée isolément. Il est toujours associé aux quatre autres éléments. L'élément eau par exemple ne signifie pas la substance eau, mais un état de la matière similaire à l'eau qui est liquide, froide, molle, humide etc. Mais l'eau en tant que substance peut prendre l'aspect solide de l'élément terre quand elle est gelée, l'aspect de l'élément feu quand elle est bouillante et l'aspect de l'élément air ou éther quand elle s'évapore. L'élément cosmique de l'ayurvéda signifie donc un état qualitatif de la matière brute, état qui est reconnaissable directement par nos sens. Il correspond au niveau de l'expérience sensorielle immédiate et n'a pas de signification fonctionnelle en lui-même; mais il en prend une par sa participation au système fonctionnel gobal que constituent les Tri Doshas.

  Les Tri Doshas.

La quintessence de l'ayurvéda se trouve réunie dans les principes des Tri Doshas, les trois "humeurs" Vata, Pitta et Kapha. L'ayurvéda définit la santé par un rapport harmonieux, un équilibre parfait entre Vata, Pitta et Kapha et une maladie résulte d'une perturbation de cet équilibre.

On les appelle des humeurs parce que la tradition indienne les traite comme des substances très subtiles. Cela peut prêter à confusion, car elles ne correspondent à aucune entité anatomo-physiologique. Certains auteurs occidentaux les considèrent donc comme des forces ou principes dynamiques, ce qui n'est pas plus heureux, car les Tri Doshas ne peuvent pas être réduits à quelque phénomène physique mesurable, étant de nature essentiellement qualitative et signifiante. Il faudrait les définir comme des états qualitatifs ou fonctionnels complémentaires des systèmes vivants, qui constituent un équilibre dynamique à l'état de santé, mais qui sont en déséquilibre dans la maladie. Les humeurs ne peuvent pas être observées isolément quand elles sont en équilibre, mais dans les états perturbés, une humeur peut se manifester lorsqu'elle devient prédominante par rapport aux deux autres.

La médecine indienne décrit les trois humeurs comme des substances subtiles. Comme toute substance elles se composent en effet d'éléments cosmiques. Mais à la différence des substances concrètes, qui contiennent toujours tous les cinq éléments réunis dans des proportions variables, chaque humeur n'en contient que deux. Cette correspondance des trois humeurs avec les cinq éléments est très précise et jouera un rôle clef dans l'interprétation des théories traditionnelles:

          Ether et Air  forment  Vata.

          Feu et un aspect de l'eau  forment  Pitta.

          Eau et Terre  forment  Kapha. (3)

La théorie des Tri Doshas est le principe de base du diagnostic et du traitement dans l'ayurvéda où elle représente le principe d'intégration des systèmes vivants que l'on retrouve nécessairement à tous les niveaux de l'organisme et qui implique donc aussi bien le niveau matériel des éléments grossiers que le niveau suprême du psychisme. Une "humeur" ne peut donc pas être définie de manière claire et simple, elle peut seulement être décrite par des propriétés analogues tirées de tous les niveaux. Elle possède des signes qualitatifs et des propriétés physiologiques, cliniques, pathologiques et psychologiques. Il suffira cependant de les esquisser ici par quelques mots-clefs concernant les qualités sensorielles, les propriétés fonctionnelles et les expressions psychologiques les plus importantes, pour ne pas surcharger inutilement cet exposé.

  Vata est sec, rafraîchissant, léger, subtil et pénétrant, mobile, clair et relâché. Ses éléments éther et air lui donnent un caractère subtil, variable, imprévisible et instable. Vata correspond à la respiration, dans le sens de prana, le souffle vital et spirituel. Il est à  l'origine de la sensibilité et de la mobilité, de l'intuition et de la motivation ou impulsivité. Il donne l'enthousiasme, l'élan vital mais en excès, il provoque l'inconstance, le doute et la jalousie.

Pitta est chaud, aigu, mouvant, liquide et visqueux. L'élément feu lui confère un caractère dynamique et brûlant. L'aspect de l'eau qu'il contient concerne la propriété liquide, visqueuse et liante. Pitta correspond à l'énergie digestive et métabolique. Il est responsable de toutes les transformations et il confère la force corporelle, le lustre, l'intelligence et le courage. A l'excès, il porte à la colère et à la haine.

Kapha est froid, humide, lourd, lent, stable et dense. Les éléments terre et eau lui donnent son caractère matériel lourd et inerte. Kapha correspond en effet à la stabilité et à la fermeté du corps, à sa résistance et à sa force. Il est responsable de la qualité  de la constitution, des muscles, du squelette et du lustre en général. Kapha assure la fermeté de caractère, la fiabilité et l'endurance. En excès il porte à l'impassibilité et à l'indifférence.

  Le corps physique: les 7 Dhatus, les 13 Srotas et Agni.

Il suffit de signaler très brièvement l'existence de ces représentations physiologiques et anatomiques de la médecine indienne, car elles n'intéressent pas directement cette étude qui s'occupe seulement du niveau de l'intégration fonctionnelle globale.

Les sept Dhatus représentent sept tissus corporels ou éléments constitutifs biologiques. Ce sont le plasma ou chyle, le sang, la chair, le tissu adipeux, l'os, la moelle (comprenant la moelle osseuse, la moelle rachidienne et le cerveau) et la semence. Cet ordre de succession des tissus correspond aux transformations que subit un aliment ou un médicament dans le processus d'assimilation.

Les treize Srotas sont des canaux permettant l'absorption, les échanges et l'excrétion. Il y en a  trois pour l'absorption de l'air, de l'eau et des aliments solides, un pour chacun des sept Dhatus et trois pour l'excrétion de l'urine, des selles et de la sueur.

Enfin Agni est le feu vital. Il règle la digestion et le métabolisme, mais il assure aussi l'épanouissement en général de l'être vivant.

  Le corps subtil: les Nadis, les Chakras et Prana Vayu.

L'ayurvéda ne s'occupe pas directement du corps subtil, celui-ci n'appartient ni au niveau empirique ni au niveau fonctionnel où se situe cette médecine. Cette doctrine appartient au yoga et aux pratiques tantriques du bouddhisme mahayana, où elle représente la relation de l'homme avec les niveaux transcendantaux. Elle se situe donc au niveau de la connaissance symbolique ou paradoxale. Selon différents auteurs, il existe cependant un lien direct entre ce niveau et le principe Vata.

  Diagnostic et thérapeutique.

Selon les textes les plus anciens, le diagnostic était basé sur une investigation très détaillée. Outre l'interrogatoire du malade, celle-ci comprenait un examen par l'inspection, la palpation, l'auscultation et par l'olfaction (des excrétions). Les traitements de l'ayurvéda comprennent d'abord des prescriptions concernant l'alimentation et le mode de vie. A cela s'ajoutent des méthodes destinées à provoquer des éliminations telles que la sudation, la vomification, la purgation, le traitement nasal et la saignée. Enfin, l'ayurvéda est connu surtout pour ses remèdes complexes confectionnés avec des plantes et d'autres substances naturelles. Pour nous occidentaux, le plus intéressant est cette expérience millénaire de l'ayurvéda en phytothérapie. L'activité thérapeutique d'une plante est déduite principalement de ses qualités sensorielles, en particulier de sa saveur, qui indiquent les éléments prédominants et par conséquent l'action de la plante sur l'équilibre global de l'organisme représenté par la complémentarité des trois Doshas. Mais la spécification par les saveurs (Rasa) n'indique que l'action globale. La matière médicale décrit pour chaque plante des effets physiologiques plus spécifiques: Virya précise le pouvoir stimulant ou apaisant, Vipaka signifie un effet métabolique particulier après la digestion, chaque plante agit sur des tissus ou Dhatus déterminés, enfin Prabhava désigne des effets intenses spécifiques correspondant à nos effets pharmacologiques proprement dits. Tout ce savoir traditionnel est donc aussi vaste que précis, mais il n'est utilisable que pour celui qui sait poser un diagnostic selon les règles de l'ayurvéda et surtout selon le système des trois Doshas. L'importance et la signification de ces règles diagnostiques et thérapeutiques seront exposés dans l'annexe.


Médecine tibétaine bouddhique.

Origines.

Dès le quatrième siècle av. J.-C., l'ayurvéda devint une médecine bouddhique en Inde et se répandit avec le bouddhisme dans tout l'est et le sud asiatique. Le Tibet cependant resta longtemps attaché à sa tradition Bön et sa médecine était surtout basée sur des pratiques chamanistes. Ce pays était donc depuis longtemps déjà entouré de nations bouddhistes lorsqu'au septième siècle, il devint une puissance militaire. Le roi Songtsen Gampo se convertit alors au bouddhisme et décida d'élever le Tibet au niveau culturel de ses voisins.  Il fit établir un alphabet dérivé de l'écriture sanscrite et les textes indiens commencèrent à être traduits systématiquement en tibétain. Ces traductions se poursuivirent de façon méthodique pendant près d'un millénaire, constituant le Tangyur, recueil du canon  classique tibétain. Ainsi le Tibet sut conserver tout le savoir de l'Inde ancienne dont presque tous les textes originaux disparurent à l'époque de la domination musulmane aux quinzième et seizième siècles. Le Tangyur constitue un trésor culturel comparable seulement à ce que devait être la bibliothèque d'Alexandrie avant sa destruction par les Romains, mais à la différence de celle-ci, il a pu être préservé, même après que la Chine communiste eût envahi le Tibet. Parmi ces textes, les seuls traités médicaux traduits du sanscrit occupent six gros volumes, en tout quatre mille pages. Le Tangyur et le fait que le lamaïsme est une continuation de la grande Tradition ésotérique, situent l'importance de la culture tibétaine pour l'avenir de la civilisation.

Le roi Songtsen Gampo ne se contenta pas de faire traduire les textes concernant la médecine. Il fit venir des médecins de Perse, de Chine et de l'Inde. Il convoqua une première conférence médicale internationale où chacun apporta un texte important qui fut traduit, et ils composèrent ainsi un nouveau traité. Un médecin perse, du nom de Galenos, resta même comme médecin à la cour royale. La médecine tibétaine est donc fondée sur la tradition indienne, mais elle contient des apports venus de la tradition chamaniste, de la médecine perse d'origine hippocratique et surtout de la médecine chinoise.

Du Samkhya au bouddhisme.

La médecine tibétaine dérive de l'ayurvéda bouddhique. La différence entre le Samkhya et la phénoménologie bouddhique, l'Abhidharma, porte sur les questions de l'existence du sujet connaisseur et de la réalité de l'objet connu. Alors que le Samkhya affirme que les deux sont réels, le bouddhisme considère l'esprit individuel (Buddhi) et le Moi (Ahamkara) comme une illusion et la connaissance que nous avons du monde devient un ensemble d'agrégats (les cinq Skandhas) qui se constituent autour de cette illusion afin de l'accentuer. Le bouddhisme ne réfute pas la réalité du monde de façon absolue, mais son existence est relativisée, puisqu'elle dépend de l'illusion que nous avons d'un Moi connaisseur. Le monde n'existe donc pas en soi mais il fonctionne, et il fonctionne tant que l'homme ne fait pas l'expérience de sa vraie nature qui se situe au-delà du manifesté. Une étude approfondie faite par un auteur indien, démontre que la différence entre le Samkhya et l'Abhidharma bouddhique n'est pas aussi fondamentale qu'elle peut paraître, les deux philosophies ont au contraire des notions ontologiques importantes en commun, qui les distinguent des philosophies judéo-chrétiennes. (4)

Dès son origine, il y eut un lien fondamental entre le bouddhisme et la médecine. Bouddha connaissait parfaitement l'ayurvéda et il exposa sa doctrine, le Dharma ou enseignement des Quatre Nobles Vérités, comme on enseignait aux médecins les principes de l'examen et du traitement du malade. Le bouddhisme mahayana influença profondément l'ayurvéda par sa compassion, qui motivait désormais la pratique et la conduite éthique de la médecine: célibat, connaissances approfondies, charité, impartialité et paix étaient exigés du médecin. Cette science était donc pratiquement réservée aux moines et la médecine devint l'un des cinq sujets majeurs qu'un moine devait étudier et maîtriser Tous les grands maîtres du bouddhisme mahayana étaient aussi de grands médecins. Cette tradition monastique fut poursuivie dans la médecine tibétaine jusqu'à nos jours. (5)

Théories fondamentales de la médecine tibétaine. (6)

  Les trois humeurs ou trois "défauts".

Pour le bouddhisme, l'univers est caractérisé par son impermanence. Toute chose n'est qu'un aspect momentané dans un flux continu d'événements et cette impermanence produit la souffrance. Mais Bouddha enseigna que la cause immanente de toute souffrance, c'est l'Ego qui se manifeste sous forme de confusion, d'ignorance ou d'illusions à propos de la vraie nature de notre  Etre. Ceci provoque à son tour l'attachement, la jalousie et le désir d'une part, la haine, l'agression et l'aversion d'autre part. Ces "trois poisons": l'ignorance (gTi-mug), l'attachement ('Dod-chags) et la colère (Zhe-sdang) produisent "trois défauts" physiques ou les trois "humeurs" qui sont respectivement le phlegme (Bad-kan), le vent (rLung) et la bile (mKhris-pa). Ces trois humeurs sont les équivalents exacts des principes fonctionnels Kapha, Vata et Pitta de la médecine indienne d'inspiration védique. Elles ont en effet les mêmes significations fonctionnelles, les mêmes correspondances organiques et se retrouvent à tous les niveaux d'organisation de l'être vivant.

  Les cinq éléments ou "énergies cosmo-physiques".

Comme dans l'ayurvéda, les trois humeurs sont constituées par les éléments cosmiques. Mais les médecins tibétains précisent que ceux-ci ne sont pas des substances et ils préfèrent les traduire par les expressions "énergie cosmo-physique" ou "fonction énergétique". Ces énergies sont cependant définies par des qualités physiques comme dans la médecine indienne. Mais à la différence de celle-ci, seuls quatre des cinq éléments constituent le corps physique et ses trois humeurs. Terre et eau forment le phlegme, le feu produit la bile et l'air le vent. Le cinquième élément appelé espace est dit omnipénétrant; aucune saveur ou propriété physique ne lui est attribuée.

  Le corps physique, diagnostic et thérapeutique.

Comme pour l'ayurvéda (et selon la théorie de la causalité du Samkhya), la maladie résulte de deux ordres de causes: la cause primordiale, immanente ou constitutive, qui résulte du déséquilibre dynamique des trois humeurs et des éléments qui les composent, et les causes immédiates et efficientes qui sont de quatre sortes: l'alimentation déséquilibrée, le comportement inadéquat, les influences climatiques et les incidences nocives. - Les conceptions anatomo-physiologiques dérivent également de la médecine indienne. On retrouve en particulier les sept tissus ou constituants corporels (Dhatus) et les trois excrétions: selles, urines et sueurs, qui jouent un rôle dans le diagnostic. Celui-ci est cependant perfectionné par les méthodes importantes que sont l'examen de la langue et la palpation du pouls, qui se pratiquent comme dans la médecine chinoise mais sont interprétés selon la théorie des trois humeurs. L'analyse de l'urine, par contre, serait d'origine spécifiquement tibétaine. - Les traitements sont également prescrits selon les principes de la médecine indienne et de ses trois humeurs. Mais aux thérapeutiques provenant de l'ayurvéda s'ajoutent des méthodes empruntées à la médecine chinoise, notamment la moxibustion ou cautérisation de certains points d'acupuncture. La matière médicale indienne a d'autre part été complétée et remaniée afin d'inclure le plantes de la flore himalayenne et sans doute aussi des substances de la pharmacopée chinoise.

  Le corps subtil.

La médecine tantrique pratiquée au Tibet se situe entre la pratique spirituelle, le Dharma, et la pratique médicale proprement dite. Elle est réservée aux moines pratiquant la discipline tantrique. Le corps subtil doit par conséquent être considéré comme le lien qui unit le corps physique au niveau spirituel ou  transcendantal. Le corps subtil comprend trois canaux principaux appelés canaux de genèse, parce qu'ils contiennent le principe vital permanent dans le cycle des renaissances. Chacun correspond de nouveau à l'un de ces trois principes que l'on retrouve à tous les niveaux dans le bouddhisme. A partir de ces trois canaux principaux se développe un système complexe de canaux secondaires ou de connexions. Ils sont reliés à cinq chakras au lieu des sept de la tradition indienne.

  Conclusion.

Les principes philosophiques de la médecine tibétaine peuvent être assimilés à ceux de la médecine indienne. Dans la pratique clinique, diagnostique ou thérapeutique, il y a cependant des différences importantes qui font de la médecine tibétaine une tradition et une science bien distincte qui, contrairement à la médecine indienne, n'a jamais connu de déclin et a continué à évoluer et à se développer par la pratique. L'intérêt pour nous de la médecine tibétaine réside dans sa matière médicale et dans le fait qu'elle a conservé intégralement les textes qui sont à l'origine de sa tradition.


Médecine chinoise.

Origines.

En Chine, les débuts de la civilisation se situent, comme pour l'Egypte, la Mésopotamie et l'Inde, vers le troisième ou le deuxième millénaire avant notre ère. C'est à cette époque reculée que l'on attribue l'origine du Yi King, le livre des métamorphoses. Ce livre de sagesse millénaire ne représente pas seulement un art de divination. Il contient tout  l'univers de la  psychologie et de la pensée chinoises. L'histoire de la philosophie chinoise connut son apogée vers le quatrième siècle avant notre ère, époque où vécurent Lao-tseu et Confucius. Les oeuvres de ces maîtres sont elles-mêmes l'aboutissement du Yi King. Leurs philosophies étaient complémentaires malgré certaines caractéristiques contradictoires et déterminèrent l'histoire de la pensée chinoise au cours des deux millénaires suivants.

L'enseignement de Confucius était une doctrine régissant l'ordre social et moral selon l'héritage spirituel et culturel de la Chine ancienne. Il établit les règles concernant le rôle de la famille, l'éducation des enfants, l'éthique, les relations sociales et le culte des ancêtres. Le confucianisme était la philosophie rationnelle de la vie active et sociale, celle de la classe dirigeante et des fonctionnaires. Le taoïsme, dont le texte fondamental, le Tao-Te-King, fut écrit par Lao-tseu, était au contraire une vision synthétique, symbolique et paradoxale de la nature, plutôt qu'une philosophie dans le sens rationnel et logique où nous l'entendons en Occident. Le bouddhisme pénétra en Chine dès le premier siècle de notre ère. Grâce à la similitude profonde des conceptions, il put être assimilé au taoïsme. Au cours du onzième et douzième siècle il y eut même une synthèse entre confucianisme, taoïsme et bouddhisme.

 La tradition attribue le premier texte classique de la médecine chinoise , le Huang Di Nei Jing, au légendaire Empereur Jaune, qui aurait vécu trois millénaires avant notre ère. Le respect absolu des traditions qu'exigeaient les conventions confucéennnes admettait difficilement les idées nouvelles. Par conséquent toute découverte en médecine ne put être publiée que dans des textes que l'on attribuait à des auteurs ayant vécu aux époques légendaires qui précédèrent celle de Confucius et de Lao-tseu. Selon les auteurs contemporains (8), le Nei Jing aurait été composé entre le septième et le troisième siècle de notre ère; les commentaires ultérieurs les plus importants et les plus cités sont le Su Wen apparu au deuxième et le Ling Shu au onzième siècle de notre ère. On ne peut donc pas prétendre que la médecine chinoise est la plus ancienne de l'histoire. Par la fameuse route de la soie, la Chine a pu entretenir très tôt des relations culturelles avec la haute civilisation du bassin de l'Indus et sa médecine a pu être inspirée par les principes philosophiques des védas et par l'ayurvéda, qui était à son apogée vers le septième siècle av. J.-C. et dont elle porte des marques fondamentales.

La philosophie du Tao.

Le taoïsme est une sagesse intuitive, symbolique et synthétique. L'esprit et la pensée chinoises sont en effet très différents de notre langage occidental moderne et de notre logique analytique. Le mot classique chinois et le pictogramme ou caractère écrit qui le représente, sont des symboles évocateurs d'une quantité de significations, d'images, de qualités et d'émotions provenant des différents niveaux de l'expérience que nous pouvons avoir de la nature. C'est pourquoi la traduction de textes poétiques ou philosophiques chinois est si difficile, voire impossible. Un mot chinois peut seulement être décrit par une énumération de termes analogues de notre langage, dont les significations sont très précises et limitatives.

La philosophie taoïste est basée sur la contemplation de la nature et de ses transformations cycliques. L'univers est éprouvé comme une suite de mutations évoluant selon des cycles qui se répètent. Ces transformations ne sont pas causées par quelque force extérieure mais surviennent spontanément par suite des relations entre deux principes opposés, le Yin et le Yang, qui sont à la fois contraires et complémentaires. Tous les phénomènes apparaissent comme des phases transitoires dans ce processus de métamorphoses cycliques, où sont impliqués ces deux principes comme deux  polarités indissociables. Dans son évolution et son fonctionnement, toute chose comporte donc nécessairement un aspect Yin et un aspect Yang.

Yin et Yang désignaient à l'origine les deux faces, ombragée ou ensoleillée, de la montagne. La lumière du ciel et le soleil brûlant  sont Yang, l'ombre rafraîchissante et la terre nourricière sont Yin. Le Yang est le principe actif, dynamique, chaud, fort et masculin. Le Yin est réceptif, inerte, froid, faible et féminin. Le Yang correspond au sujet agissant et à l'esprit, le Yin à l'objet passif et à la matière. La philosophie taoïste insiste sur la complémentarité de tous les aspects contradictoires de la nature. Yin et Yang symbolisent tous ces principes contraires mais complémentaires où l'un ne peut être défini que par son opposition à l'autre. Ils correspondent à la logique de l'antagonisme de Lupasco qui a été présentée et appliquée dans la première partie de cet essai. Cette complémentarité des contraires reste difficile à comprendre pour les Occidentaux, dont la pensée reste profondément ancrée dans la logique grecque, aristotélicienne ou chrétienne, influencée par le dualisme de l'exclusion des contraires d'origine mazdéenne ou manichéenne, dont dérive le principe de la contradiction exclue et du tiers exclu. Dans la logique chinoise, aucune qualité ne peut être affirmée comme une vérité absolue, car elle n'est jamais qu'une phase dans le processus cyclique de la métamorphose, où elle coexiste en alternance avec la phase contraire. Le bien ne peut être défini que par opposition au mal et le mal n'existe que par rapport au bien, leur affirmation ne peut donc être qu'une vérité relative. La seule réalité absolue réside dans l'union mystique et paradoxale des principes contraires, du Yin et du Yang. Cette réalité ultime transcendante, non manifestée mais origine de la manifestation, est le Tao.

Selon Lao-tseu, le un engendre le deux, le deux engendre le trois, et le trois engendre les dix mille choses. La philosophie s'intéresse surtout au deux, au Yin et au Yang, dont l'union paradoxale conduit au Tao transcendant. Pour la médecine par contre, Yin et Yang représentent l'antagonisme primordial qui, à travers un principe ternaire, fait fonctionner la  réalité manifestée: l'être vivant.

Théories fondamentales de la médecine chinoise. (7)

 Théorie du Yin-Yang.

Pour la médecine traditionnelle chinoise, le corps humain, comme tout autre phénomène naturel, est un processus de métamorphoses perpétuelles. Dans cette activité de transformation, le Yin constitue la base matérielle de toute fonction et représente aussi la réserve d'énergie. A l'inverse, le Yang signifie l'activité physiologique ou énergétique effective, qui maintient l'essence Yin en la renouvelant continuellement. La complémentarité des deux principes opposés est ainsi à l'origine de la vie. Par conséquent, la santé est définie par l'équilibre harmonieux entre le Yin et le Yang et la maladie apparaît lorsqu'une cause de maladie provoque un déséquilibre. Il existe donc des maladies Yang, où l'activité Yang est excessive et la base Yin insuffisante, et des maladies Yin, lorsque l'inertie Yin prédomine ou que l'énergie Yang est insuffisante. La structure corporelle elle-même est soumise à la loi du Yin-Yang. L'homme est situé entre le ciel et la terre, des deux il tient son énergie. Le ciel étant Yang, la partie supérieure de son corps, qui en reçoit l'énergie, est Yang; et la terre étant Yin, la partie inférieure du corps, qui en  reçoit l'énergie, est Yin. Mais toutes les partie du corps et toutes leurs subdivisions ultérieures sont elles-mêmes soumises à cette polarisation entre le Yin et le Yang. Ainsi la partie supérieure, Yang du corps comprend le thorax qui est Yang par rapport à l'abdomen mais Yin par rapport à la tête. Le thorax est donc le Yin dans le Yang et la tête le Yang dans le Yang.

Théorie des cinq éléments.

La médecine chinoise est fondée sur une théorie des cinq éléments, comme l'ayurvéda. Selon certains auteurs, celle-ci proviendrait d'ailleurs de l'Inde (8), selon d'autres, les éléments auraient déjà été mentionnés par des textes attribués au deuxième millénaire avant notre ère (9). Quoiqu'il en soit, il y a une analogie entre les deux théories, mais aussi des différences considérables. Dans la pensée chinoise, un élément ne représente pas seulement des propriétés physiques et des qualités sensorielles; il a un sens hautement symbolique qui embrasse tous les niveaux de la connaissance rationnelle. Les deux  tableaux (Fig. 6) reproduits du livre de B. Auteroche et P. Navailh, réunissent les significations les plus importantes des cinq éléments dans la nature en général et dans la médecine en particulier. On peut constater que les éléments expliquent à la fois l'univers, l'espace et le temps, des qualités sensorielles, des propriétés fonctionnelles et des émotions psychiques. 

Fig.6 - Les significations analogiques des éléments

signification des éléments chinois

Mais l'application des éléments à l'homme et à la médecine correspond à un ensemble fonctionnel plus restreint et plus cohérent.

A vrai dire, la médecine traditionnelle chinoise ne parle pas de cinq éléments mais de cinq "mouvements". Les phénomènes biologiques ont été expliqués à l'époque tardive du néo-confucianisme par des cycles fonctionnels où les éléments constituent des étapes ou phases de la transformation. Cette théorie distingue ainsi deux cycles physiologiques (de production et de domination) et deux cycles pathologiques (d'agression et de contre-domination). Ces relations ou cycles des cinq éléments jouent un rôle considérable dans le diagnostic et le traitement, surtout pour certaines écoles d'acupuncture implantées en Occident. En Chine par contre, la théorie des relations cycliques des cinq éléments n'est plus enseignée dans les écoles de médecine traditionnelle. Elle a été abandonnée non seulement pour des raisons idéologiques, mais aussi pour des raisons pratiques. On lui reproche en effet de réduire les rapports complexes des phénomènes biologiques à des formules arbitraires. L'application stricte et sans discrimination de ces théories conduirait à des situations qui ne correspondent pas aux réalités physiologiques et pathologiques (11).

Mais même si la théorie de ces cycles des éléments peut être rejetée en raison de sa simplification outrancière et rigide de la physiologie, le symbolisme exprimé par ces éléments constitue cependant un enrichissement inestimable de la connaissance systémique et fonctionnelle de l'organisation biologique, car cette pensée analogique permet de dévoiler les relations qui existent entre différents niveaux d'intégration de la complexité biologique. A chaque élément chinois correspond en effet:

  • un organe "plein" ou parenchymateux, qui est attribué à un méridien Yin,
  • un organe "creux" ou viscère attribué à un méridien Yang,
  • un organe sensoriel, ou l'ouverture corporelle correspondante, désigné comme la "clef pour la compréhension" de la propriété fonctionnelle de l'élément,
  • un tissu corporel, dont le lustre "manifeste" la fonction de l'élément,
  • une émotion qui représente l'expression d'une disposition  fonctionnelle globale correspondant à cette phase du fonctionnement.

Toutes les conceptions et théories de la médecine chinoise se réfèrent par conséquent à ces éléments ou phases de la métamorphose. Dans les pages suivantes, le sens symbolique attribué par la médecine chinoise aux organes ou tissus corporels sera mis en relief de manière aussi concise que possible. A travers ce symbolisme, les éléments peuvent être compris comme des propriétés ou conditions fonctionnelles fondamentales des systèmes biologiques, qui correspondent à un niveau de l'organisation fonctionnelle globale, transcendant celui de l'observation expérimentale des phénomènes matériels. Cependant toute référence aux connaissances physiologiques et anatomiques occidentales doit être évitée. Il faut se garder en effet de faire une comparaison entre les conceptions scientifiques et celles de la médecine traditionnelle chinoise, car, pour celle-ci, l'organe lui-même devient le symbole d'un mouvement de cet ensemble fonctionnel que constitue le corps humain, alors que pour la médecine scientifique, l'organe est une pièce à considérer isolément et dont les relations avec les autres parties de l'organisme ne peuvent être expliquées  que par des structures et interactions biochimiques.

Théorie du Qi, du sang et des liquides organiques.

Le Qi, le sang (Xue) et les liquides organiques (Jin Ye) servent de base matérielle aux structures et au fonctionnement des organes et viscères. Ces trois principes sont comparables aux trois humeurs des médecines indienne et tibétaine.

Le Qi est un terme chinois intraduisible, que l'on décrit habituellement par les mots fonction, activité, énergie ou souffle. Il correspond à l'humeur indienne Vata ou au "vent" de la médecine tibétaine. La meilleure expression pour traduire Qi est le mot fonction, si l'on donne à ce terme un sens très général qui englobe les énergies physiques, les informations et les structures porteuses auxquelles toute fonction est nécessairement liée. La médecine chinoise donne en effet des noms différents au Qi, précisément selon que l'un ou l'autre de ces divers aspects fonctionnels est envisagé. Mais elle considère le Qi comme un principe matériel et non pas spirituel, puisqu'il "circule" dans les vaisseaux, les méridiens et d'autres structures de l'organisme. Par souci de clarté, les différents Qi de l'énergétique chinoise ne seront pas énumérés ici. Leur sens fonctionnel sera exposé au chapitre .

Xue ne correspond qu'en partie au sang dans le sens physiologique occidental. Selon la médecine chinoise, le sang est produit par "l'essence des aliments" qui provient de l'estomac et de la rate et qui est  transformée par l'énergie du poumon et du coeur. Le sang a surtout un rôle métabolique. Il fournit l'énergie du métabolisme à tous les organes du corps; celui-ci lui doit donc son dynamisme. Le sang devient ainsi le vecteur de la force physique et aussi de l'activité mentale. Il a par conséquent une signification analogue au Pitta de l'ayurvéda et à la bile de la médecine tibétaine.

Jin Ye, les liquides organiques, comprennent la totalité des liquides physiologiques normaux du corps. On distingue le Jin qui signifie les sérosités claires, et le Ye qui désigne les sécrétions troubles et visqueuses, aussi bien celles qui lubrifient les articulations que les substances plus épaisses constituant la moelle osseuse ou rachidienne et le cerveau. Ces liquides et substances ont les propriétés de Kapha ou du phlegme tibétain.

La théorie du Qi-Xue-Jin Ye est donc une théorie des humeurs corporelles comparable  à celles de l'Inde et du Tibet. Mais son rôle dans la médecine chinoise est moins important.

Théorie des méridiens d'acupuncture.

Les méridiens d'acupuncture constituent pour les Chinois un système de communication  réglant les relations entre les différentes parties du corps. Selon les explications données au chapitre  , ils représentent les  projections sur la surface  corporelle des réseaux de la substance fondamentale qui assure la régulation globale fondamentale de l'organisme. Des  précisions sur cette méthode thérapeutique sont données dans l'annexe. Les relations de ces méridiens entre eux et leurs correspondances avec les éléments et les organes jouent un rôle fondamental dans la représentation du fonctionnement global de l'organisme et par conséquent pour les règles thérapeutiques non seulement en acupuncture mais aussi en phytothérapie chinoise.

Le système d'acupuncture comporte douze méridiens principaux de chaque côté du corps:

    - Il existe six méridiens Yin qui dirigent l'énergie Yin de bas en haut. Chacun d'eux correspond à un organe. Trois méridiens Yin partent du pied et montent à l'organe correspondant dans le tronc. Trois autres méridiens Yin montent du tronc à la main (l'homme étant toujours représenté les bras levés). - Au niveau des organes du tronc, chaque méridien Yin venant du pied est couplé à un méridien Yin allant à la main, formant ainsi un des trois "niveaux d'énergie Yin": Tai Yin, Shao Yin, Jue Yin.

- Il existe six méridiens Yang qui dirigent l'énergie Yang de haut en bas. A chacun d'eux est attribué un viscère. Trois méridiens Yang descendent de la main vers la tête. Trois autres méridiens Yang descendent de la tête au pied. - Au niveau de la tête, chaque méridien Yang venant de la main est couplé à un méridien Yang allant au pied, formant ainsi un des trois "niveaux d'énergie Yang": Yang Ming, Tai Yang, Shao Yang.

- Chaque méridien Yin est couplé à un méridien Yang, soit au niveau du pied, soit au niveau de la main. Chacun des couples Yin-Yang ainsi formé correspond à un élément.

Fig.7 - Système des méridiens d'acupuncture

méridiens d'acupuncture

Les relations entre ces méridiens principaux sont résumés dans le tableau (Fig. 7), qui montre que de leurs différents couplages résultent trois grands orbes. On constatera qu'il existe six couplages Yin-Yang qui correspondent à six éléments . D'autre part il faut signaler que les Chinois ne désignent pas le méridien du nom de l'organe ou du viscère qui lui est attribué, comme cela  est d'usage dans les écoles d'acupuncture occidentales, mais  par le niveau d'énergie auquel il appartient. Le méridien du Poumon, par exemple, est appelé Tai Yin de la main et le méridien de l'Estomac Yang Ming du pied. Cela signifie que, pour les Chinois, les relations  fonctionnelles et énergétiques sont plus importantes que les correspondances anatomiques. Ces constatations sont importantes pour comprendre la conception globale de l'intégration fonctionnelle en médecine chinoise.

Théorie des  organes et des viscères.

Cette théorie est aussi importante que  celle des méridiens d'acupuncture. Elle combine le symbolisme de la théorie des éléments avec les réalités physiologiques, métaboliques et fonctionnelles des organes et des viscères. Les significations fonctionnelles que la médecine chinoise prête aux organes, aux viscères et aux autres tissus ou organes sensoriels qui leur sont attribués, sont d'une importance capitale. Elles donneront la clef pour une interprétation systémique et rationnelle des médecines traditionnelles.

Le mot Zang désigne les organes internes "pleins" ou parenchymateux: foie, coeur, rate, poumon et rein. Fu signifie les organes "creux" ou viscères: vésicule biliaire, intestin grêle, estomac, gros intestin et vessie. Conformément à leur rattachement aux méridiens, chaque  organe Zang est couplé à un viscère Fu. Les organes Zang sont Yin, ils constituent la base matérielle et les réserves énergétiques d'un fonctionnement représenté par un élément. Les viscères Fu couplés sont Yang et expriment l'activité physiologique effective de ce même fonctionnement. Chaque élément signifie donc un état de fonctionnement qui est représenté par un organe et le viscère couplé, rattachés eux-mêmes à des méridiens Yin et Yang. Ce fonctionnement est d'autre part symbolisé par un des cinq organes sensoriels ou par l'ouverture corporelle correspondante et se manifeste par l'état d'un tissu et par une émotion qui sont en relation avec cet élément.

Comme le système des méridiens comprend six couples de méridiens, alors que les éléments et les organes sont au nombre de cinq, la médecine chinoise a introduit un organe et un viscère "curieux", désignés par les termes de "Maître du Coeur" (M.C.) et "3 Réchauffeur", et un élément supplémentaire, le "Feu ministériel", fonctionnellement distinct du "Feu impérial" qui correspond au Coeur, afin de satisfaire aux règles de symétrie exigées par le système d'acupuncture.

L'exposé suivant résume le symbolisme des éléments à travers le sens fonctionnel des organes et de leurs divers attributs. Les aspects physiologiques ou anatomiques ne sont mentionnés que pour illustrer ce symbolisme. Les noms des organes et des viscères seront écrits désormais avec une majuscule pour indiquer qu'ils signifient un symbolisme chinois et non pas une réalité anatomo-physiologique occidentale.

Elément BOIS.

Foie - Vésicule biliaire.        (Jue Yin - Shao Yang du pied)

Le Foie correspond à l'élément Bois qui symbolise la naissance, la croissance et l'épanouissement. Sa fonction est régulatrice de la digestion, du métabolisme, du sang et des émotions. Le Foie conserve Xue, le sang et Qi, l'énergie, qu'il libère selon les besoins. Si sa fonction Yin de conservation est insuffisante, l'excès Yang, qui n'est plus retenu, cause le syndrome de vent-chaleur de Foie, qui se manifeste par de la fièvre, des tremblements, de l'irritabilité ou des émotions fortes telles que de violentes colères. - L'état de sa fonction se manifeste aux muscles et tendons, organes de l'activité motrice. La clef pour la compréhension du Foie est l'oeil, organe sensoriel de la forme et de la lumière, qui dirige l'action et qui exprime l'énergie vitale et les émotions.

Elément FEU.

Coeur - Intestin grêle.                                              (Shao Yin - Tai Yang de la main)

Le Coeur appartient à l'élément Feu. Il gouverne le sang et les vaisseaux et il est le siège du Shen qui représente la conscience, l'esprit et la vitalité. - Le Coeur se manifeste aux vaisseaux que la médecine traditionnelle chinoise assimile aux méridiens, et qui assurent donc la communication entre les parties du corps, leur union. Le Coeur est le centre moteur de ce système de communication, symbolisant l'unité du corps et de la conscience. La clef pour la compréhension du Coeur est la langue, organe de la parole, de la communication, par laquelle la conscience exprime sa volonté.

Maître du Coeur - Trois Réchauffeurs.                     (Jue Yin - Shao Yang de la main)

Le Maître du Coeur (M.C.) et son viscère couplé, le "3-Réchauffeur", sont des organes virtuels. Ils ne correspondent à aucune entité anatomique. Le M.C. représente un méridien, mais dans la théorie des cinq organes il est assimilé au Coeur et à l'élément Feu. Il a pourtant une fonction distincte et précise. Son nom chinois Bao Xin  signifie littéralement "enveloppe du coeur", ce qui est souvent traduit abusivement par péricarde. Mais le sens du terme chinois est symbolique et signifie "protecteur du Coeur": toute agression externe atteint d'abord le M.C. avant d'atteindre le Coeur. Mais les chinois anciens faisaient la distinction entre le "Feu impérial", le Coeur, et le "Feu ministériel" ou Maître du Coeur. Cette distinction éclaire la fonction. L'Empereur représentant le pouvoir, c'est lui seul qui prend les décisions. Son ministre prépare ces décisions; c'est lui qui reçoit les informations concernant les affaires extérieures et qui imagine des projets d'action pour l'Empereur. La fonction du ministre est évidemment étroitement liée à celle de l'Empereur dont il est l'ombre. Aussi la signification physiologique du méridien M.C. est-elle similaire à celle du  méridien du Coeur. Il a une fonction de défense et une influence sur la circulation et sur l'activité psychique et intellectuelle.

Elément TERRE.

Rate - Estomac                                 (Tai Yin - Yang Ming du pied)

La Rate appartient à l'élément Terre, car elle a une fonction de transport, de transformation et d'assimilation des substances nutritives et aussi de l'eau et de l'humidité. Elle retient le sang dans les vaisseaux. Si cette fonction est entravée, il y a accumulation d'humidité et de glaires. La Rate fait monter l'essence pure des aliments vers le Poumon, afin qu'elle soit transformée en Qi et en sang. - La fonction de la Rate se manifeste dans l'aspect de la chair et des autres tissus et se reconnaît à l'état des membres. La clef pour la compréhension de la Rate est la bouche, ouverture du corps sur la substance nutritionnelle, ce qui symbolise le contact intime avec la matière. La bouche est en effet le siège du sens gustatif qui règle l'appétit et l'ouverture qui reçoit les substances nutritives.

Elément MÉTAL

Poumon - Gros intestin.                    (Tai Yin - Yang Ming de la main)

Le Poumon appartient à l'élément Métal. Il est responsable du Qui de tout l'organisme. Le Poumon est le lieu où le Qi pur venant du ciel communique avec le Qi intérieur. Cette énergie respiratoire du Poumon signifie une fonction de purification, d'échange et de distribution de l'énergie vers le bas et vers la périphérie. Elle répartit le Qi, le sang et les liquides vers tous les organes périphériques. -  En effet la fonction du Poumon se manifeste  à la peau et aux poils, et la clef pour sa compréhension est le nez, ouverture vers l'espace, l'atmosphère ambiante, et organe de l'odorat qui est le plus subtil des sens. Le Poumon symbolise en effet la sensibilité à l'environnement en général.

Elément EAU

Rein - Vessie.                                               (Shao Yin - Tai Yang du pied)

Le Rein appartient à l'élément Eau qui signifie, dans le symbolisme chinois, le froid hivernal, le Nord et  la conservation. La fonction principale du Rein est de conserver l'essence Jing qui, selon le Su Wen, est la base de l'organisme. De cette essence dépend la croissance, le développement normal et l'intégrité physique et mentale. Dans le Ling Shu il est dit que le début de l'homme surgit avec le Jing. En effet, le Jing inné est reçu des parents, mais il doit être complété durant toute la vie par le Jing acquis, produit de la transformation des aliments par la Rate. Le Jing conditionne l'activité des organes et la reproduction. La seconde fonction du Rein concerne la régulation des liquides organiques. L'énergie Yang du  Rein évapore ces liquides, séparant le pur de l'impur; alors que le premier remonte au Poumon, pour être redistribué, le second est éliminé par la Vessie. Enfin le Rein réceptionne le Qi venu du Poumon. - L'état des Reins et de l'essence Jing est manifesté par les os du squelette, la moelle et les cheveux. Par moelle il faut entendre la "moelle de la colonne vertébrale" qui comprend, comme prolongement, le cerveau ou "mer des moelles". Le Rein a donc une fonction de structuration, de conservation héréditaire, de mémoire cérébrale et de reproduction. La clef pour la compréhension du Rein est l'oreille. L'ouïe est un sens passif, réceptif en permanence, qui a chez l'animal une fonction spéciale d'alarme ou de sécurité, assurant la conservation. La peur est l'émotion spécifique du Rein.

Etiologies, diagnostic et thérapeutiques.

Pour la médecine traditionnelle chinoise, la maladie est avant tout un déséquilibre entre l'énergie de défense de l'organisme (Zheng Qi) et les agressions de l'environnement ou causes de maladie au sens strict (Xie). Ces déséquilibres se manifestent de différentes façons et sont classés selon huit principes, représentés sous forme de quatre antagonismes. Le plus important de ces antagonismes est le Yin-Yang, les autres en sont des cas particuliers. La maladie peut donc être:

                  Yang                           ou                    Yin

  •           superficielle                  ou                    profonde
  •           chaude                         ou                    froide
  •           pleine                           ou                    vide

Le déséquilibre peut être provoqué par trois types de causes:

  •  Les conditions climatiques: vent, froid, chaleur estivale, humidité, sécheresse et chaleur brûlante.
  • Les causes internes sont les émotions excessives: joie, colère, souci, chagrin, tristesse et peur.
  •  Les autres nocivités comprennent les blessures, les erreurs diététiques, le surmenage etc.

Le diagnostic se fonde sur une sémiologie précise exigeant un examen complet comprenant l'inspection, l'audition, l'olfaction, et la palpation. Il faut souligner l'importance de l'inspection de la langue et de la palpation du pouls. Ces méthodes propres à la médecine chinoise donnent des indications sur l'état des méridiens et des organes. Le médecin chinois exprime ensuite son diagnostic sous forme de syndromes. Ce sont les syndromes des organes et des viscères, des méridiens et de leurs niveaux d'énergie et les syndromes du Qi, du sang et des liquides organiques.

Les méthodes thérapeutiques de la médecine chinoise comprennent d'abord des règles de conduite par rapport aux influences climatiques et concernant le comportement psychique et des conseils d'alimentation. La diététique chinoise est un art particulier qui est basé sur les mêmes principes que la pharmacopée chinoise.  Celle-ci comprend des substances naturelles d'origine végétale, animale et minérale, qui sont classées, comme dans la médecine indienne ou tibétaine, selon les saveurs et les autres qualités physiques telles  que leurs propriétés chauffantes ou réfrigérantes, et selon leurs affinités pour les différents organes, conformément à la théorie des 5 éléments. - Enfin l'acupuncture proprement dite est prescrite par le médecin chinois selon le cas, comme thérapeutique adjuvante, mais elle est en général  appliquée par un acupuncteur sans formation médicale.

Malgré certaines similitudes de la médecine chinoise avec la médecine indienne, en ce qui concerne la théorie des  cinq éléments et son application diagnostique et thérapeutique,  il existe cependant sur le plan pratique des divergences considérables concernant certaines conceptions  mais aussi les dénominations des éléments.

Notes bibliographiques.

(1) Nandalal Sinha a écrit une préface au livre "The Samkhya philosophy", une collection de textes originaux, où il résume et commente les principes fondamentaux de la philosophie du Samkhya. Le

(2) Les résumés des principes fondamentaux de l'ayurvéda se fondent sur les publications de G. Edde, Dash Bhagwan (1986), B. Heyn, V. Lad, V. Lad /D. Frawley, Ch.G. Thakkur. (consulter la liste des auteurs.)

(3) L'association de l'élément eau à l'élément feu pour former Pitta est mentionnée chez Lad V./D. Frawley, ("Die Ayurweda-Pflanzenheilkunde", p. 29) et chez Ch. G. Thakkur (Ayurveda - die indische Heil- und Lebenskunst, p. 79)

(4) Sinha B. M., "Time and Temporality in Samkhya Yoga and Abhidharma Buddhism".

(5) Clifford T., p. 64-65.

(6) Les résumés des principes fondamentaux de la médecine tibétaine se fondent sur les publications de Clifford T., Dash Bhagwan (1976), Massin Ch., Meyer F., Tsarong/Drakton/Chomphel (consulter la liste des auteurs).

(7) Les résumés des principes fondamentaux de la médecine chinoise se fondent sur les publications de Auteroche B. / Navailh P., Schnorrenberger C. et Porkert M. (consulter la liste des auteurs).

(8) Clifford T. affirme que les éléments chinois proviennent du bouddhisme. L'influence de la médecine indienne sur la médecine chinoise a cependant pu intervenir beaucoup plus tôt, déjà à l'époque de l'apogée du védisme au début du premier millénaire av. J.C., ou même avant, pendant la civilisation prévédique. Selon J. Amoyel, des spécialistes de la préhistoire pensent que l'acupuncture est parvenue à la Chine depuis  la vallée de l'Indus en passant par la route de la soie. Ainsi la théorie des éléments aurait pu l'accompagner par la même voie.

(9) Schnorrenberger C., p. 63

(10) Auteroche et Navailh, p. 20.

(11) Schnorrenberger C., p. 75-76.

(12) Selon une citation donnée par C. Sagnières ("L'acupuncture, mythes et réalité", p. 37), Y. Manaka, célèbre acupuncteur japonais, "l'énergie désigne quelque chose qui n'a pas de forme, un fonctionnement".